Les likes : la machine à aimer et être aimé

Lever le voile de l'illusion

Newsletter du 06 juin 2024

 

C’est en 2009 que Facebook a implémenté la possibilité de “liker” les posts de ses “amis” en cliquant sur le symbole d’une main fermée avec le pouce levé (signe que faisait les romains pour sauver les gladiateurs). À partir de ce moment, Facebook a laissé les utilisateurs décider de ce qui leur semblait le plus intéressant en mettant en avant les publications qui avaient reçus le plus de “likes”.

La récompense digitale est née !

Dix ans plus tard alors que cette fonction a gagné toutes les plateformes ( Youtube, Instagram, X ( Ex-Twitter ), Tumblr … ), Meta ( maison mère de Facebook et Instagram ) a songé à le supprimer. Mais pourquoi le like est devenu si détestable ?

To like or to be liked ?

Fier de vous, vous cliquez pour exprimer votre opinion, ça y est vous êtes un LIKER. En faisant cela vous indiquez votre adhésion à la paix dans le monde ou votre amour pour les toutous. Génial ! Les plateformes et autres analystes de données peuvent ainsi suivre les grandes tendances et déterminer votre engagement sur tous les sujets.

Un outil statistique puissant qui va permettre de continuer à capter votre attention en permanence. Du pain béni pour les différents réseaux sociaux pour savoir comment vous garder “online” et donc vous diffuser plus de publicités ciblées en fonction de vos goûts. Et ne vous inquiétez pas les plateformes ont pensé à tout, le fait de ne pas liker une publication est aussi une information capitale enregistrée dans votre profil…

En mettant en avant les posts les plus likés qui vous plairont, bye bye la contradiction. Les débats deviennent des arènes dans laquelle se battent à mort les haters contre les lovers à coups de commentaires violents. On ne se construit plus une opinion, on choisit un camp. Adieu la nuance !

Qui m’aime me suive !

De l’autre côté se trouve les LIKÉS, ceux qui reçoivent le Saint Graal, validés par les autres utilisateurs. C’est une telle récompense qu’elle provoque dans le cerveau un shoot de dopamine (DOPAMINE, l’hormone du plaisir à voir sur Arte ) dont l’on devient vite accro et qui va influencer directement vos prochaines publications afin d’obtenir plus de likes, donc plus de dopamine … ce mécanisme vous fait ainsi revenir sans cesse sur les apps pour vérifier que les autres utilisateurs vous ont validé.

De l’envoi de notifications constantes pour ne pas oublier de venir voir qui a liké votre post, au retardement de l’affichage des récompenses, pour accroitre encore plus la libération de dopamine, tout est fait par les plateformes pour accroitre votre dépendance vis à vis des apps.

La course aux likes génèrent aussi une forte pression sociale, et leur influence sur la santé mentale est catastrophique. Ne ressentez-vous pas ce vague sentiment de mal-être quand un contact lambda affiche tout le bonheur de ses vacances à Bali pendant que vous regardez la pluie tomber par la fenêtre de votre bureau ? alors que, qui sait si ces photos ne datent pas d’il y a plus de deux ans ou ont été créées avec de l’IA…

C’est à la fois une spirale sans fin de recherche d’amour et des montagnes russes de l’estime de soi, de compétition, de challenges toujours plus extrêmes pour obtenir LE cliché qui fera le plus de likes, quitte à prendre des risques idiots … et en mourir.

D’ici à se dire que votre vie est nulle comparée à tous ces gens qui profitent des voyages, des bons restos, de nuits de folies avec leurs amis, il n’y a qu’un pas… Les cabinets des psychologues ne désemplissent pas (+50% entre 2019 et 2022 – en hausse aussi avec l’impact du COVID passé en bonne partie sur vos écrans) et les cliniques esthétiques voient des jeunes leur demander de ressembler à leurs filtres instagram.

La prochaine fois, réfléchissez à deux fois avant de liker ;-), ne croyez pas que tout le monde, sauf vous, a une vie de milliardaire. Et pourquoi ne pas plutôt profiter de nos recos culturelles ❤️!

Des recommandations culturelles en partenariat avec Vive la Culture !

Lever le voile de l’illusion

On ne trouve pas confiance en soi sans soulever le voile de l’illusion.

 

Black Mirror, Chute LibreCharlie Broker, 2016 – Netflix

Dans l’épisode 1 de la saison 3 de Black Mirror, chaque personne est notée en permanence par son entourage sur une échelle de 1 à 5. Une note inférieure à 4 entraîne l’interdiction de l’accès à certains services. Une note encore inférieure peut vous condamner à des peines de prison. En Chine Black Mirror c’est déjà demain. Depuis 2014, le gouvernement développe le système de « crédit social », un outil administratif qui vise à attribuer une note à tous les Chinois en fonction des informations que le gouvernement possède sur eux.

 

La questionFrançoise Hardy, 1971

C’est une artiste dont j’ai découvert la discographie sur le tard, notamment pour préparer une émission à laquelle je travaille. Pour cette occasion, j’ai trouvé des productions très sophistiquées. En plus, elle écrit ses chansons, et les thèmes qu’elle aborde (le manque de confiance en soi, la peur de ne pas être aimée, etc.) le sont d’une façon élégante. Il y a quelque chose de très Français chez Françoise Hardy.” Matthieu Conquet, animateur sur France Inter.

 

AlamutVladimir Bartol, 1938 – Libretto

… je partage l’humanité en deux catégories fondamentalement différentes : une poignée de gens qui savent ce qu’il en est des réalités et l’énorme majorité qui ne sait pas.” Retranché dans sa citadelle dominant la plaine, le grand maître Hassan Ibn Sabbâh mène, à la fin du XIe siècle, une guerre sainte en Iran. Parti de presque rien, sans armée, sans terre et sans appuis à la cour, il finira par dominer le monde. Un millénaire plus tard, la manipulation des masses, telle qu’il la pratiqua, continue d’ébranler les empires modernes. Mélange d’aventures et de philosophie politique, Alamut n’évoque la violence des complots d’alors que pour mieux renvoyer aux problèmes cruciaux des civilisations modernes.